“Personne ne décidera à la place des Ivoiriens”

Publié le par vicky delore ndjeuga

Sortie de crise en Côte d'Ivoire


Vicky Delore Ndjeuga, journaliste, Volontaire des Nations Unies en Haïti :

“Personne ne décidera à la place des Ivoiriens”

Vicky Delore Ndjeuga est journaliste de profession. Il a exercé pendant plusieurs années en Côte d'Ivoire. Camerounais d'origine, il est depuis bientôt un an Volontaire des Nations Unies (VNU) à la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH). De passage à Abidjan, il jette un regard sur la situation socio-politique ivoirienne et parle de son expérience haïtienne.

Parlez-nous de votre expérience de journaliste qui se retrouve, du coup, dans une organisation internationale…

 


J'ai vécu et travaillé pendant plusieurs années en Côte d'Ivoire. Un pays que j'ai appris à connaître et à aimer. J'ai notamment fait mes classes au quotidien Le Jour où j'ai passé quelque 10 années, ensuite, à l'Agence France presse (AFP), et enfin, à l'Intelligent d'Abidjan, où j'ai connu de très bons moments.

 

C'est justement de L’Intelligent d’Abidjan que j’ai été recruté comme Volontaire pour le compte de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti.  Depuis le 10 octobre 2005, j'y travaille. J'ai passé 5 mois au quartier général de la Minustah à Port- au-Prince, où j'ai exercé, d'abord comme rédacteur en chef du magazine de la Minustah, Espas Minustah. J'ai ensuite été déployé dans la troixième grande ville du pays, les Gonaïves, où je joue le rôle de responsable régional de la communication et de l'information publique.

 


Parlez-nous de vos expériences avec cette organisation internationale, comparativement à sa présence en Côte d'Ivoire avec l'Onuci, ainsi que de son rôle dans la stabilité politique en Haïti.

 


Il faut dire qu'au plan comparatif, Haïti tout comme la Côte d'Ivoire, sont deux pays qui traversent des moments difficiles, des moments de crise plirielle : politique, économique et sociale. En Côte d'Ivoire, comme en Haïti, les Nations Unies apportent leur appui au retour à la paix et à la stabilité politique.

 

En Haïti, précisément, la résolution 1542 du Conseil de sécurité recommande à la Minustah d’apporter tout son appui aux autorités haïtiennes, en vue de rétablir un espace démocratique et de sécurité et d’aider à la relance économique.

 

En deux ans, la Minustah a réussi à organiser des élections démocratiques. Un processus long, un processus difficile, mais un processus qui a porté des fruits, parce qu'au plan démocratique, aujourd'hui, Haïti a retrouvé une stabilité certaine. Ce pays dispose, en effet, d’un Président et un parlement élus et reconnus. Les Nations Unies ont apporté un appui technique te logistique durant tout le processus électoral : de l'enregistrement des électeurs à la  publication des résultats, en passant bien sûr par la délivrance des Cartes d’Identification Nationale (CIN) et l’organisation des élections. La Minustah a été omniprésente à toutes les étapes du processus électoral. Et son appui au Conseil Electoral Provisoire (CEP), la structure officielle en charge les élections, a été judicieux.

Comparativement à la Côte d'Ivoire qu'est-ce que vous pouvez dire aux Ivoiriens sur la Mission des Nations Unies en Côte d'Ivoire ?

 


Je ne veux pas donner de leçons. Cependant, le constat est qu’en Haïti, les Haïtiens ont exprimé le vœu d'élire un président, après le départ du pouvoir du Président Jean-Bertrand Aristide en 2004. Ils ont exprimé une ferme volonté d'élire des autorités de façon démocratique. Et la communauté internationale apporté son appui à cette volonté du peuple haïtien.
Il faut que les Ivoiriens sachent que c'est à eux de prendre conscience de le nécessité d élire, de façon démocratiques, les futurs dirigeants de leur pays. Parce que la communauté internationale ne remplace pas le peuple ivoirien, non ! Sa mission est d’aider le peuple ivoirien à réaliser ses ambitions, ses objectifs.

 

Lors des élections du 7 février 2006 en Haïti, il y a eu une mobilisation totale. Les Haïtiens avaient un seul slogan : voter pour que l’avenir du pays change.
Donc, en Côte d'Ivoire, il faudrait que, de façon collective, les Ivoiriens manifestent la volonté réelle d'aller aux élections. Les Nations Unies, à ce moment, apporteront tout leur appui à la réalisation de cette volonté, seule gage de la relance économique et du développement du pays.

 


Peut-on vraiment parler d’élections démocratiques en Haïti, sans Jean-Bertrand Aristide en exil?

 


Haïti est un Etat souverain. Haïti a ses lois que les Nations Unies respectent. Les Nations Unies n'interviennent pas dans la sélection des candidats. Elles apportent un appui logistique, technique, un appui opérationnel aux instituions haïtiennes en charge des élections. C'est vous dire que Haïti a ses lois, les Nations Unies ne cherchent pas à savoir si elles sont bonnes où mauvaises. Dès le moment où elles sont acceptées par les populations haïtiennes, le problème ne se pose plus. La Minustah agit conformément à la résolution 1542 qui recommande d'apporter son appui aux autorités haïtiennes, afin qu'elles rétablissent un environnement démocratique et sécurisé.

Alors, vous voici revenu sur votre base, chez vous en Côte d’Ivoire. 7 mois après, quel est constat vous faites ?

 

Beaucoup de choses ont, en effet, changé. Et j'ai la ferme conviction que, une fois que les Ivoiriens auront décidé que la guerre cesse, elle va cesser. Mais, il faut qu'ils le décident, parce que personne ne viendra décider à leur place.

 

En quoi consiste concrètement votre tâche en Haïti ?

 

Depuis le mois de mai 2006, je suis déployé dans la troisième grande ville du pays, les Gonaïves,  où j’assume les fonctions de responsable régional de la communication et de l'information publique. Ma mission consiste d'abord à expliquer le mandat et les actions de la Minustah. A rendre visible tout ce que la Minustah, dans toutes ses composantes, civiles et militaires, fait pour l'amélioration des conditions de vie des populations. D'aider au renforcement des capacités des journalistes locaux, notamment par l’organisation des séminaires de formation, des ateliers de renforcement des capacités.

 

Alors, côté jardin. Vous venez de vous marier, êtes-vous un homme heureux au jour d'aujourd'hui ?

 


Un homme heureux, je dis oui. Mais, un homme surtout satisfait d'avoir franchi le pas. Un homme satisfait d'avoir franchi une étape dans la vie, parce que, vous le savez, le mariage est une étape de la vie. Et, chaque fois qu'on franchit une étape, c'est un peu une sorte de succès qu'on remporte sur soi-même. Maintenant, mon souhait est que les jeunes qui n'ont pas encore franchi le pas, le fassent.

 

Vous êtes membre de la grande famille de la presse ivoirienne, et vous vivez aujourd'hui une aventure internationale. Qu'avez-vous à conseiller aux jeunes journalistes ivoiriens ?

 


Je tiens d'abord à dire qu’en Côte d'Ivoire, il y a de bons journalistes. Je le dis à partir l’expérience vécue ici. Le secret de la réussite réside dans le travail. Il faut, chaque jour, chercher à faire un peu plus, se remettre en cause, dans l’optique de s'améliorer.

 


Vous retournez bientôt en Haïti, quel est votre mot de fin pour la Côte d'Ivoire ?

Que la Côte d'Ivoire retrouve la paix le plus tôt. Il y va de l'intérêt de tous.

 


Interview réalisée par
Laurent Nahounou

 

L'intelligent d'Abidjan du mercredi 30 août 2006

 

 

 

 

Publié dans crise ivoirienne

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